COLONEL BASTIEN-THIRY
Il y a 50 ans l' assassinat du Colonel Bastien-Thiry
Publié le 11/03/2013
par konigsberg
.
Il y a cinquante ans à 11 heures, la vermine gaulliste assassinait le Colonel Bastien-Thiry
Un policier qui conduisit Bastien-Thiry au peloton raconte : « Il semblait enveloppé d’une auréole »
Le 11 mars 1963 tombait au Fort d’Ivry le colonel Bastien-Thiry, héros de l’Algérie française, fusillé sur ordre de De Gaulle.
Monsieur Pierre Sidos a, pour la première fois, autorisé la publication d’un document unique qu’il détient depuis trente ans.
Je ne puis dire la fierté que m’inspire le choix du Libre Journal pour cette publication.
Ce
récit des ultimes instants du colonel Bastien-Thiry fut rédigé de la
main même d’un témoin privilégié : un dirigeant de la police française
qui, pour mieux servir la France dut cacher son admiration pour l’homme
qui allait mourir et pour la cause à laquelle cet homme avait sacrifié
sa vie. Nous reviendrons d’ailleurs prochainement, avec la permission de
monsieur Pierre Sidos, sur cet épisode étonnant de l’histoire
contemporaine.
Pour
l’heure, ce témoignage extraordinaire permet de mesurer à quels drames
de conscience ont été confrontés certains fonctionnaires de l’état
gaulliste, en ces temps de trahison.
Il
devrait rendre moins péremptoires les donneurs de leçons qui, sans
risque, jugent et condamnent, un demi-siècle plus tard, des hommes qui
n’ont fait que leur devoir « Pour que France continue. »
——
Samedi 9 mars 1963 – 17 heures.
P…,
commissaire divisionnaire à l’état-major de la police municipale, me
demande au téléphone de mon bureau du 5ème district, avenue d’Italie, et
m’invite a venir d’urgence à son bureau. Je ne puis m’empêcher de
m’exclamer : « Je crois, hélas, deviner pourquoi ».
Je
pars donc à la préfecture, et là, P… me confirme qu’en effet, si
Prévost et Bougrenet de la Tocnaye sont graciés, l’exécution de
Bastien-Thiry est ordonnée pour le lundi 11 mars au matin. Le moins
qu’on puisse dire est que les choses n’ont pas traîné depuis le jugement
qui doit remonter à quinzaine.
Nous voici à mettre sur pied le futur service d’ordre…
B…, commissaire de Choisy, assurera un isolement total des Prisons de Fresnes, avec des effectifs considérables.
L…,
commissaire de Charenton, qui sera de ronde de nuit du 10 au 11,
consacrera tout son temps à la surveillance de l’itinéraire Prisons-Fort
d’Ivry ; effectifs généreusement prévus : on ne lésine vraiment pas…
B…,
commissaire d’Ivry, assurera les fonctions judiciaires : accompagnement
des autorités, présence sur le lieu de l’exécution et procès-verbal
pour en rendre compte.
Détail
pénible : on le charge de commander le cercueil et on lui donne les
mensurations du malheureux ; ces préparatifs hideux, concernant un homme
bien vivant, espérant sans doute encore avec ses proches auxquels il
est toujours relié par la pensée (comment oublier sa femme et ses trois
petites filles ?) me mettent dans un trouble profond et me font abhorrer
la peine de mort.
Je
reviens chez moi, sans dire un mot, en proie au désespoir et au dégoût,
me demandant comment je vais vivre ces quarante-huit heures d’attente…
Pour
comble, je préside le soir même, le bal de la section de Gentilly de
l’orphelinat mutualiste de la PP. Comment ai-je pu, avec mes pensées en
désarroi, tenir devant les niaiseries de ces gens se contorsionnant, et
faire le discours d’usage ?
Le
dimanche est une véritable veillée funèbre : je ne sais où aller pour
fuir les pensées qui m’assaillent. La journée passe, morne. Sans avoir
dormi, je me lève à une heure du matin. Il pleut à torrents. Par les
rues désertes je vais à la préfecture prendre contact avec les équipes
en civil de la Brigade de direction, mises à ma disposition pour
chercher, véhiculer et protéger au besoin les juges, le procureur
général, l’aumônier, le médecin.
C’est
un médecin de l’Armée de l’air qui doit assister, ô dérision, à cette
mort. Les braves gars de la Brigade, des gens courageux toujours prêts à
traquer les criminels, la nuit, sont ébranlés eux aussi. Ils ont à tour
de rôle escorté le prisonnier tout au long des nombreux trajets
Prisons-Fort de l’Est où siégeait le tribunal. Les rares contacts qu’ils
ont eus avec Bastien-Thiry (entrevu quand il montait et descendait du
fourgon cellulaire) leur ont laissé malgré tout une profonde impression
que l’on éprouvait en le côtoyant, même sans lui parler… « Il semblait
enveloppé d’une auréole… »
Je
repasse au district, encore plus ému par ce bref aveu d’un humble flic.
Je prends dans ma voiture mon chauffeur de service et un secrétaire et
nous partons pour Fresnes.
Dès notre arrivée, je vois une dizaine de reporters de presse filmée ou de télé qui allument leurs projecteurs.
Cette
attente des badauds de profession en prévision d’une curée, recherchant
avidement tout ce qui se présente de sensationnel, me semble quelque
chose d’indécent. Usant des consignes draconiennes que j’ai reçues,
c’est sans ménagements que je les fais refouler dans le bistrot voisin
qu’ils ont déjà fait ouvrir et où ces importuns ont établi leur PC.
Les
effectifs arrivent, les commissaires mettent en oeuvre le plan qu’ils
ont reçu, je reste rencogné dans le fond de ma voiture, après les avoir
successivement revus.
Je
suis embossé dans l’allée menant au pavillon résidentiel du directeur
de la prison, M. Marti. Le condamné est dans le bâtiment voisin : le CNO
(Centre national d’orientation), où sont habituellement concentrés les
prisonniers en attente d’une autre affectation. Cette masse sombre est
silencieuse : les CRS de garde aux abords courbent le dos sous l’averse.
Ma radio grésille doucement. Paris est encore en léthargie ; la police
prend la place sur l’itinéraire, sans bruit la pluie fait rage… J’écoute
le vide… et prie.
Tout
à coup, les abords de la prison s’animent : B…, qui attend près de la
porte, pénètre dans le CNO en compagnie de M. Marti. L’aumônier suit.
Survient Gerthoffer, le procureur général, silhouette falote, moulé dans
un pardessus gris aux formes démodées ; il descend de voiture et saute
pour éviter les flaques d’eau, faisant le gros dos sous les rafales. Ces
vieillards allant faire tuer un être jeune, plein de vie encore, me
semblent une énormité inhumaine.
Pendant ce temps, De Gaulle doit reposer dans sa sinistre morgue…
La
gendarmerie, chargée de livrer le condamné au peloton d’exécution, a
fait grandement les choses : une escorte de trente motos, celle d’un
chef d’Etat, trois petits cars bourrés d’effectifs armés, pour
s’intercaler entre les divers véhicules du cortège, prennent place sur
l’avenue dite « de la Liberté ». Le car chargé de transporter le
condamné, avec une garde de huit gendarmes, entre dans la prison. Nul
n’ignore que la gendarmerie est le pilier de ce régime…
B… m’informe par radio que, toutes les personnalités étant arrivées, on va réveiller le condamné.
Il
me relatera ensuite que c’est Gerthoffer qui est entré le premier et
que Bastien-Thiry a aussitôt demandé quel était le sort de ses
compagnons. Apprenant qu’ils étaient graciés, il sembla alors délivré de
tout souci et entra dans une sorte d’état second, abandonnant toute
contingence terrestre.
Il
revêt son uniforme et sa capote bleu marine de l’Armée de l’air sans
prêter un instant d’attention aux paroles bien vaines que ses avocats
croient devoir prononcer.
Il
entend la Messe à laquelle assiste également M. Marti. Il est, même aux
yeux des moins perspicaces, en dialogue avec le Ciel. Au moment de
communier, il brise en deux l’hostie que lui tend l’aumônier et lui
demande d’en remettre la moitié à son épouse. Puis, après l’Ite Missa
est, il dit « Allons »… et se dirige vers le couloir de sortie. A ce
moment, les phares des voitures s’allument, les motos pétaradent, et
j’annonce par radio la phrase que j’ai si souvent prononcée lorsque
j’étais avec De Gaulle : « Départ imminent »…
L’état-major la reprend pour alerte générale.
Mais
rien ne vient, et cette attente imprévue semble atroce. Pendant vingt
affreuses minutes les avocats vont tenter une démarche désespérée : ils
demandent au procureur général d’ordonner de surseoir à l’exécution en
raison du fait nouveau qu’est l’arrestation récente d’Argoud.
Bastien-Thiry,
absent de tout, revient dans sa chambre, stoïque, silencieux, méprisant
devant ces passes juridiques où chacun s’enlise. Il ne dira pas un mot,
ni d’intérêt, ni d’impatience…
B…, qui n’est pourtant pas un croyant, me dit : « Il est déjà parti en haut ».
Enfin, les palabres des hommes de loi prennent fin : le procureur refuse tout sursis.
Les
phares s’allument de nouveau, les motos repartent à vrombir. Cette
fois, c’est bien le départ. Je vois la voiture du condamné balayer de
ses phares le seuil de la prison, puis se diriger vers le portail ; tout
le cortège s’ébranle. C’est bien celui d’un chef d’Etat, dans son
triomphe.
Ce
condamné qui, au procès, a traité De Gaulle d’égal à égal et l’a
assigné au Tribunal de Dieu et de l’histoire, comme renégat à la parole
donnée, aux serments les plus solennels et sacrés, ce condamné est bien
un chef d’Etat.
C’est
bien le même cortège que j’ai si souvent commandé : voiture pilote avec
phare tournant, motos devant, motos formant la haie d’honneur, motos
derrière, et quinze voitures officielles suivant…
La pluie redouble ; je reste loin derrière, suivant la progression par radio codée… comme pour l’Autre…
Je
décide d’aller directement au cimetière de Thiais, triste
aboutissement… Je n’aurais pas pu assister à ce Crime, pas même rôder
autour du Fort d’Ivry et entendre cette horrible salve.
Au
moment où j’entre parmi les tombes, j’entends cette petite phrase de
B…, et elle me restera longtemps dans l’oreille : « Allô… Z1… » ; le
processus s’accélère… « Je vois le condamné contre son poteau ». Et, à
6h42, cette information : « Exécution terminée ». Je sais gré à B…
d’avoir évité la formule consacrée « Justice est faite », elle serait si
malvenue ici. Justice… où es-tu ? J’attends encore : rien. Donc, il n’y
a pas eu défaillance du peloton comme pour le malheureux Degueldre.
Je
vais avec D…, dont je connais les sentiments proches des miens ; nous
nous rendons au carré des condamnés. C’est une triste parcelle
recouverte de hautes herbes jaunies par le gel, entourée d’arbustes
dénudés, frêles et désolés. Un trou a été creusé dans la glaise qui
colle aux chaussures.
Enfin
arrive un fourgon, escorté par le colonel de gendarmerie de
Seine-et-Oise. On descend le cercueil en volige de bois blanc.
L’aumônier arrive ; il est suivi du médecin, un grand maigre, tout gêné.
Je viens saluer et me recueillir avec D… Les gendarmes se retirent ;
les fossoyeurs, à l’abri
dans le bâtiment de la Conservation tardent à venir. Nous restons là,
tous les quatre, à prier devant cet humble cercueil, placé de travers
sur le tas de glaise, courbant le dos sous les rafales de ce sale hiver
qui n’en finit pas…
Dehors,
les premiers banlieusards se hâtent vers le travail, indifférents à
tous ces policiers massés devant le cimetière. Chacun va à ses
occupations, c’est le monstrueux égoïsme des grandes cités.
Ainsi est mort pour son idéal, le Rosaire au poignet, Jean-Marie Bastien-Thiry, trente-quatre ans, ingénieur de 2e
classe de l’aviation militaire, père de trois petites filles, devenues
subitement orphelines, demeurant de son vivant 17, rue Lakanal, à
Bourg-la-Reine.
Paris, le 11 mars 1963, 11 heures du matin.
Communiqué d'Alexandre Simonnot
Jean-Marie
Bastien-Thiry était Lorrain, Polytechnicien, Lieutenant-colonel dans
l’Armée de l’air et l’inventeur de deux missiles antichars, les SS-10 et
SS-11. Il avait 36 ans et laissait une veuve et trois petites
orphelines.
Organisateur
de l’opération du Petit-Clamart, le Colonel Jean-Marie Bastien-Thiry
aura tout sacrifié, sa famille et sa vie, pour que vive la France. Il
nous a laissé, en versant son sang, un message, un modèle à méditer, à
admirer et à suivre.
Alors que les tireurs du Petit-Clamart seront graciés par De Gaulle, celui-ci refusera d’accorder sa grâce à Bastien-Thiry.
Jean-Marie
Bastien-Thiry est l’exemple parfait du dévouement, du courage, de
l’abnégation, du don de soi et du sacrifice de sa vie envers la Patrie.
Il est l’honneur de l’Armée Française.
Homme
de Foi, grand Catholique, il mourra comme un Saint, marchant vers le
peloton d’exécution son chapelet à la main, après avoir entendu la
Messe. Refusant d’avoir les yeux bandés, il regardera la mort droit dans
les yeux avant de pouvoir contempler ensuite la Vie Eternelle.
Assassiné
sur ordre de celui qui aura trahi l’Algérie Française et livré des
dizaines de milliers de Harkis et Pieds-noirs aux tortures les plus
innommables des bouchers fellouzes du FLN, le Colonel Jean-Marie
Bastien-Thiry demeure un Français modèle, un héroïque soldat dont le nom
restera pour toujours inscrit sur le Martyrologe de la Nation.
Que
Jean-Marie Bastien-Thiry repose en paix, aux côtés de tous les Morts
pour la France, dans le Paradis des Héros, des Martyrs et des Soldats.
voir également cet article
.(konisberg.center-blog.net)
=====================
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire