LE SOLDAT COMME INTERVENANT HUMANITAIRE
Alain de Benoist : « Les guerres idéologiques modernes ont pris le relais des anciennes guerres de religion »
– Nicolas Gauthier pour Boulevard Voltaire. – (…) Grande
est l’impression que, désormais, non content de battre l’ennemi, il faut
l’annihiler, le criminaliser, voire le convertir…
N’assistons-nous pas à
des parodies de croisade, les droits de l’homme ayant remplacé les
Évangiles ?
Dès que l’on se situe sur le terrain de la morale, une telle
évolution est inévitable. Les guerres de religion sont par définition
les plus meurtrières, parce que l’ennemi n’y est plus perçu comme un
adversaire du moment, qui pourrait éventuellement devenir un allié si
les circonstances changeaient, mais comme une figure du Mal.
C’est pour
en finir avec les guerres de religion qu’au lendemain des traités de
Westphalie (1648) un nouveau droit de la guerre (jus ad bellum), lié à l’avènement de ce qu’on a appelé le jus publicum europaeum,
a vu le jour.
Son but explicite était d’humaniser la guerre, de la
« mettre en forme », selon l’expression de Vattel. C’était une guerre à justus hostis :
on admettait que celui-là même que l’on combattait pouvait avoir ses
raisons. Il était l’ennemi, mais il n’était pas le Mal.
La victoire
s’accompagnait d’un traité de paix, et nul ne cherchait à perpétuer, au
lendemain des combats, une hostilité qui n’avait plus lieu d’être.
Les guerres idéologiques modernes ont pris le relais des anciennes
guerres de religion, avec lesquelles elles ont une évidente parenté : il
y est toujours question du Bien et du Mal.
Ces guerres modernes
ressuscitent le modèle médiéval de la guerre à justa causa, de
la « guerre juste », c’est-à-dire de la guerre qui tire sa légitimité de
ce qu’elle défend une « juste cause ».
L’ennemi est, dès lors,
nécessairement tenu pour un criminel, un délinquant, qu’il ne faut pas
seulement vaincre, mais dont on doit aussi éradiquer tout ce qu’il
représente.
Les guerres « humanitaires » d’aujourd’hui sont des guerres
au nom de l’humanité : qui se bat au nom de l’humanité tend
nécessairement à regarder ceux qu’il combat comme hors humanité.
Contre
un tel ennemi, tous les moyens deviennent bons, à commencer par les
bombardements de masse.
Dès lors s’effacent toutes les distinctions
traditionnelles : entre les combattants et les civils, le front et
l’arrière, la police et l’armée (les guerres deviennent des « opérations
de police internationale ») et finalement la guerre et la paix, puisque
avec la « rééducation » des populations conquises, la guerre se
prolonge en temps de paix.
Quant au soldat, comme l’écrit Robert
Redeker, l’auteur du Soldat impossible, il est « remplacé par
un mixte de policier, de gendarme, d’intervenant humanitaire,
d’assistance sociale, d’infirmier et de pédagogue », chargé de
« convertir, en punissant les récalcitrants, tous les États aux droits
de l’homme et à la démocratie ».
Ce n’est plus qu’une apparence de
soldat. (…)
Texte intégral : bvoltaire.fr/alaindebenoist/les-guerres-ideologiques-modernes-pris-relais-anciennes-guerres-religion,56814
(novopress.info)
============
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire