vendredi 24 décembre 2010

Les chrétiens d'Orient ont fait souche à Sarcelles

vendredi 24 décembre 2010

C'est la communauté d'Assyro-Chaldéens la plus importante de France.

En cette période de Noël,les « plus vieux chrétiens du monde » regardent vers l'Irak, où leurs frères sont persécutés.

Il y aura des encens capiteux, des chants ancestraux en syriaque, « la langue de Jésus », et des prêtres officiant « dos au peuple ».
Comme d'habitude, l'église Saint-Thomas sera bondée, des fidèles par centaines venus de Sarcelles et de sa région. Mais la messe de minuit vibrera d'une ferveur toute particulière. Elle frissonnera de pensées qui fileront vers Bagdad.
Et sa cathédrale Notre-Dame du Perpétuel Secours où, la veille de la Toussaint, une attaque d'Al-Qaida a provoqué la mort d'une cinquantaine de chrétiens.

Ce drame a resserré, s'il en était besoin, les Assyro-Chaldéens de Sarcelles. La communauté la plus importante de France. Huit mille chrétiens d'Orient qui se partagent cette ville du Val d'Oise avec les juifs et les musulmans.

Leur coeur bat à Saint-Thomas, briques ocre, lignes orientales, construite en 2003. « Payée et remboursée par nos parents en trois ans », relève fièrement Isé, 27 ans.

« On a plutôt réussi »

Lui fait partie de la première vague de Chaldéens arrivée en France dans les années 1980. Des bergers fuyant les montagnes du Kurdistan, en Turquie orientale, dont les villages ont été quasiment « téléportés » en région parisienne.

La famille d'Isé ¯ les parents, six garçons, une fille ¯ a fini par acheter un pavillon à Sarcelles. Et retrouver dans la même rue sept autres familles chaldéennes.

« Vivre ici. Sans idée de retour. » À Sarcelles, ils perpétuent scrupuleusement leur vieille société patriarcale. Tout le monde est cousin et se reconnaît encore à son village d'origine. La foi, la religion et la langue, l'araméen et sa version modernisée, le soureth, servent de ciment. Une communauté avec ses trois associations, son club de foot.

Ses enterrements qui se prolongent trois jours. Ses mariages qui peuvent réunir mille personnes et coûter jusqu'à 30 000 €.

Dans le lot, peu de mariages mixtes. S'unir avec un musulman reste pour les plus anciens un tabou indépassable.

Longtemps, les hommes ont travaillé dans la confection, dans le quartier du Sentier ou ailleurs. Aujourd'hui beaucoup ont acheté des cafés-tabacs. « En vingt-cinq ans, avoue Isé, on a plutôt réussi, on est tous propriétaires. C'est une communauté attachée à l'ordre, qui vote à droite, mais aime bien son maire de gauche. »

Combien de temps résisteront-ils au monde extérieur ? Aux États-Unis où la diaspora est plus ancienne, certaines digues ont déjà cédé. « À Bagdad, on avait un monde hostile autour de nous. On s'accrochait à nos valeurs. Une question de survie. Dans les pays occidentaux, on n'a pas la même menace. Il y a une tendance à se laisser aller, à perdre sa culture, sa langue. »

Fawzi Nissan, 47 ans, fait partie de la deuxième vague d'immigration chaldéenne. Arrivé en France en 1992, après la première guerre du Golfe, avec sa femme Samira et l'aînée de leurs cinq enfants, Sandra, 19 ans aujourd'hui. Eux aussi se sont installés à Sarcelles.

Après une année au Mans, dans un centre d'accueil.

Chez les Nissan, on se parle en soureth. Sauf avec les deux plus jeunes, Christian, 8 ans, et Alexis, 5 ans, qui ne connaissent pas la langue. Sandra, elle, fait son droit à Cergy. À l'aise dans les traditions chaldéennes.

À l'aise à la fac. Même si, reconnaît-elle, « on nous reproche d'être souvent renfermés sur nous-mêmes ».

Dans un souffle, elle prédit : « Notre sort va être celui des Portugais aujourd'hui. » Assimilés.

Source et publication: Marc PENNEC/Ouest-France.

(jean-marielebraud.hautetfort.com)

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