DE LA TRANSCENDANCE TOTALE A L'IMMANENCE ABSOLUE***NOTE SPIRITUELLE N°6 DU FRERE THOMAS DE LA TRINITE
On a célébré, récemment, la fête de la Très Sainte Trinité.
De tous les dogmes catholiques (symbole de Nicée-Constantinople, 380 AD),
ce dogme est probablement celui qui se heurte le plus, au besoin de comprendre, à l'exigence d'un minimum de rationalité, qui existent en tout homme...même chez les plus croyants.
Aucune des métaphores, généralement utilisées par les prédicateurs, pour "faire passer le message", comme "le livre en trois volumes" ou "la fontaine à trois bouches", n'est vraiment satisfaisante, et nos détracteurs musulmans ont beau jeu de nous accuser de polythéisme (ils disent que nous "associons").
En fait, n'en déplaise à Saint Thomas d'Aquin, il n'y a pas d'explication véritablement acceptable, philosophiquement parlant (et il en est de même de ses fameuses cinq "preuves"...).
La seule explication est "historique", et se trouve dans l'Histoire des dogmes.
Nul n'a jamais vu Dieu, nous dit Saint Jean (Jn 1:18), et par conséquent la théologie (discours sur Dieu), ne peut être que spéculative.
Mais tout concept de Dieu, est également lié au degré d'évolution culturelle, de la société qui le produit - à son degré de "civilisation".
Le Dieu (ou les Dieux) des sociétés primitives, est toujours un Dieu totalement transcendantal, résidant dans un lieu très éloigné, inaccessible au commun des mortels : le "ciel".
Il est invisible, omnipotent, implacable et punit sévèrement tous ceux qui enfreignent ses lois (communiquées au bon peuple, par l'intermédiaire la caste religieuse). Il doit être régulièrement propitié, par des sacrifices humains; ils deviendront plus tard, animaliers (akéda d'Isaac).
Cependant, plus l'homme se civilise, plus il désire se rapprocher de son Dieu.
Et la pression populaire amène les théologiens (scribes) à formuler, dans leurs écrits, des concepts du divin, de plus en plus immanents.
Le Dieu "caché" commence à se montrer (théophanies); et alors qu'originellement il résidait, en permanence, "au plus haut des cieux", entouré de la cour céleste, il va commencer à envoyer certains de ses archanges (heb: sar malachim, c'est-à-dire, Princes des anges), le représenter sur terre.
L'ange la Présence (heb: chekinah) va désormais résider dans le "saint des saints" du temple de Jérusalem (à l'endroit même où les musulmans ont cru devoir bâtir la mosquée d'al aksa).
Cet ange, est en réalité beaucoup plus qu'un ange : c'est l'un des "visages" de Dieu (heb: panim- grec: prosopo); les théologiens parleront d'hypostase.
Les anges, chez les hébreux, ne sont pas les éphèbes de la renaissance (ni des bébés joufflus), ce sont des monstres terrifiants, probablement inspirés des lions ou des taureaux ailés, qui gardaient l'entrée des palais et des temples de Babylone (cherubim)
Seul le Grand Prêtre, pouvait, une fois l'an, pénétrer dans le saint des saints,
afin de prononcer le Nom de Dieu.
Il craignait tellement de s'évanouir (voire de mourir), en présence de la chékinah, qu'il se faisait attacher à des chaines, afin que les prêtres puissent, si nécessaire, le tirer en dehors (eux-mêmes ne pouvant y pénétrer).
Une fois le temple détruit (70 AD), ce sont les rabbins et les scribes qui prendront la relève, et feront évoluer le "discours sur Dieu", pour répondre, comme je l'ai dit, aux attentes populaires.
Le Dieu transcendantal commence à se manifester (grec: apokalupto) de plus en plus souvent, et sous des formes diverses.
Des scribes (les darshanim) se spécialisent dans une forme littéraire très particulière et spécifique à la littérature religieuse hébraïque : le Midrash.
Il s'agit d'exégèses, basées sur l'Ancien Testament.
On spécule dont sur l'ange de la Présence, mais aussi sur l'Esprit de Dieu (heb: rouach-grec: pneuma), qui dans la Genèse (1,2) "flotte à la surface des eaux".
Dans les midrashim, appelés "Evangiles", c'est-à-dire, "Bonne nouvelle" (apocryphes,comme canoniques), il deviendra le saint-Esprit.
Lui aussi quittera de temps en temps la cour céleste, pour descendre sur terre (Pentecôte).
L'ange de la Présence et l'Esprit saint (rouach ha kodesh), ne sont pas les seules hypostases à retenir l'attention des darshanim : la Gloire de Dieu
(heb: kabod-grec: doxa) se manifeste au Mont Thabor. Le Pouvoir de Dieu
(heb: gebourah-grec: dunamis) et l'archange de la Grâce (heb: hesed-grec: karis), appelé Tsadkiel sont également présents dans ces écrits.
Mais l'objet principal de ces spéculations sur l'immanence de Dieu, c'est incontestablement le Messie (heb: mashiah-grec: christos).
Un Christ (Messie) qui, dans la littératue judéo-chrétienne ante-nicéenne
(avant le concile de Nicée de 324 AD) est un ange : le Christos-angelos; ou plutôt le premier des archanges, qui finit par réunir dans sa personne les dix hypostases (elles deviendront, au moyen-age, les dix "sephirots" de la cabale).
C'est ce que nous annonce la darshan Shaül de Tarse, plus connu sous le nom de Saint-Paul : "car il plut à Dieu de faire habiter en lui, toute la plénitude"
(Col 1:19)(Quia in ipso complacuit, omnen plenitudinem inhabitare).
Ainsi, chez les pagano-chrétiens, les véritables fondateurs de l'Eglise,
le processus d'immanence, atteint son paroxisme, ou plutôt son apogée :
chez Saint-Paul, le Christ est toujours un ange, qui "revêt l'aspect d'un homme" (Phil 2:7) (afin de tromper les archontes); mais chez le darshan Iohanân, plus connu sous le nom de St-Jean, qui composa probablement son midrash à Patmos, le messie est un homme : l'hypostase de la Parole de Dieu (heb: davar-grec: logos) "s'est fait chair " (et "a habité parmi nous") (kai o logos sarks egeneto -et verbum caro factum est)(Jn 1:14).
Notons que l' Evangile de Jean est paradigmatique de la méthode "midrashique". Son prologue est en effet une paraphrase du 1er chap. de la Genèse : "Bereshit bara elohim..." (Au commencement Elohim créa...devient : "En arche en ho logos...")(Et le logos était avec D' et le logos était D').
Le Dieu des chrétiens, Notre Seigneur Jésus-Christ, est donc, dans l'histoire de la pensée religieuse, la forme la plus achevée d'un Dieu totalement immanent.
Et ce Dieu immanent, c'est un Dieu d'Amour et de compassion : c'est la Trinité
Amour telle que la définie le symbole de Nicée (le "credo").
Les "Gentils" des premiers siècles de notre ère, ne voulaient plus d'un Deus absconditus, jaloux et sanguinaire, résidant très loin d'eux, entouré de roues de feu (ophalim) et de serpents de feu (séraphim), des quatre "vivants" remplis d'yeux, qui s'injuriaient en permanence, pendant que d'autres créatures aussi terrifiantes, chantaient, Saint,saint, saint est le seigneur notre Dieu, pour les siècles des siècles...
Aussi ils demandèrent à "ceux qui écrivent des discours sur Dieu", un Dieu-le -Père, qui "a tant aimé le monde, qu'il a donné son Fils unique" (Jn 3:16).
N'en déplaise aux dialogueurs de l'interreligieux, notre Dieu n'est pas le Dieu des Juifs, et encore moins celui des musulmans.
Il ne veut certainement pas, que l'on lapide les femmes adultères :
il les sauve au contraire, des mains des barbares, et leur dit :
"Va, et ne pèche plus". (Jn 8:3).
Frère Thomas de la Trinité
(dans le siècle, J-P Pagès-Schweitzer)
ndlr: Cet article a été refusé par Guillaume de Thieulloy. Il faut probablement en conclure qu'il contient une "cinquième" vérité. JPPS.
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