samedi 10 avril 2010

POUTINE A KATYN : UNE PREMIERE

Poutine à Katyn, une première dans les relations de Moscou avec la Pologne

Le Premier ministre russe Vladimir Poutine rendra hommage mercredi avec son homologue polonais à quelque 22.000 officiers polonais assassinés par la police secrète soviétique, une première dans les relations difficiles entre les deux pays, 70 ans après le massacre de Katyn.

"C'est la première fois que Moscou invite un Premier ministre polonais à Katyn", souligne l'historien Andrzej Przewoznik, chef d'un comité polonais veillant sur les lieux de la mémoire nationale.

Jusqu'à présent, les dirigeants polonais s'y rendaient à titre semi-privé. Mercredi, Donald Tusk et Vladimir Poutine rendront également hommage aux Soviétiques victimes de la terreur stalinienne, qui reposent aussi dans la forêt de Katyn, près de Smolensk, dans l'ouest de la Russie.

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"Les bourreaux du NKVD qui, en avril 1940, ont exécuté d'une balle dans la nuque ces Polonais, s'étaient bien entraînés en tuant en 1937 ou 1938 des milliers de Russes", explique M. Przewoznik à l'AFP.

A Moscou, on souligne que la visite de Poutine à Katyn "a une importance exceptionnelle", selon les termes de Timofeï Bordatchev, analyste proche du gouvernement. "La Russie veut avoir de bonnes relations avec la Pologne, un des grands acteurs de l'UE", ajoute M. Bordatchev.

Le mot "pardon" sera-t-il prononcé? A Varsovie, on est réaliste.

"Là n'est pas la question. L'essentiel est que le sort encore méconnu de plus de 7.000 officiers soit révélé, les restes retrouvés et enterrés, afin que leurs proches puissent faire le deuil", dit M. Przewoznik.

Or, la justice russe a classé toute l'affaire du massacre, interdisant la publication du jugement et des actes de procédure.

Le 5 mars, l'ONG russe Memorial a appelé le président Dmitri Medvedev à rouvrir l'enquête sur ce "crime de guerre et crime contre l'humanité".

Ce massacre des élites polonaises, propriétaires terriens, professeurs, avocats ou médecins mobilisés, a été commis dans plusieurs endroits, notamment à Kharkiv (Ukraine) et Miednoïe (Russie), mais Katyn en est devenu le symbole.

Symbole aussi du plus grand mensonge entretenu pendant un demi-siècle par la propagande soviétique et celle de la Pologne communiste.

"J'ai dû taire la vérité sur la mort de mon père jusqu'en 1989, ma mère m'avait appris une formule : "porté disparu pendant la guerre", raconte Marcin Zawadzki qui se rend à Katyn avec la délégation officielle.

Mobilisé pour combattre les Allemands, son père avocat fut fait prisonnier par l'armée soviétique qui a envahi la Pologne le 17 septembre 1939 aux termes du pacte germano-soviétique Ribbentrop-Molotov.

Deux télégrammes, deux cartes postales de Kharkiv, où il a été exécuté sommairemenht, sont ses seuls souvenirs.

En avril 1943, les Allemands ont découvert des charniers à Katyn et révélé au monde les atrocités des Soviétiques. Ceux-ci en ont aussitôt accusé l'Allemagne nazie.

Il aura fallu attendre 1990 et le dirigeant Mikhaïl Gorbatchev pour que Moscou reconnaisse sa responsabilité.

Aujourd'hui encore, la vérité sur Katyn est peu connue des Russes, longtemps nourris à la propagande officielle.

"Les officiers polonais ont été tués avec des armes allemandes et par les Allemands eux-mêmes", clamait encore récemment le député communiste Viktor Ilioukhine.

"Poutine à Katyn coupera court à ces mensonges", souligne Slawomir Debski, directeur de l'Institut des affaires internationales, un centre d'études polonais.

"Les mots d'un ex-agent du KGB, la police soviétique héritière du NKVD, auront un poids dans le débat qui s'ouvre timidement en Russie sur le rôle de Staline", estime-t-il.

En signe d'ouverture, la chaîne publique russe Koultoura a diffusé vendredi soir le film "Katyn" du réalisateur polonais Andrzej Wajda. "Je n'aurais jamais cru vivre ce jour", a dit le cinéaste, dont le père Jakub Wajda a été tué à Katyn.

Maja CZARNECKA

Source du texte : AFP
(theatrum-belli.com)
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