mardi 26 novembre 2013

CORNELIUS GURLITT

Trésor nazi : 39 œuvres de Toulouse-Lautrec retrouvées

Programme pour <i>L'Argent</i>, lithographie en couleur de Toulouse-Lautrec, 1895.
L'inventaire des œuvres trouvées à Munich lors d'une perquisition se poursuit. Cette troisième vague de publications de dessins et lithographies montre que le collectionneur proche des nazis Hildebrand Gurlitt ne s'intéressait pas qu'aux expressionnistes nordiques et allemands.

 Il prisait aussi les témoignages du gai Paris postimpressionniste.

La deuxième vague de publications d'œuvres saisies à Munich chez Cornelius Gurlitt, fils d'un collectionneur proche des nazis, avait révélé la semaine dernière une quantité remarquable de feuilles d'Edvard Munch. La troisième, visible comme les précédentes sur le site www.lostart.de, se distingue par le nombre d'Henri de Toulouse-Lautrec. Trente-neuf au total. Comme pour les Munch, il s'agit d'estampes: deux tirages sur zinc et des lithographies, souvent sur vélin. 

Les personnages hauts en couleurs, proches de l'artiste, constituent le gros du bataillon de sujets dont les dates d'exécution vont de 1893 à 1898. Ainsi Henry Somm, Coquelin l'aîné ou mademoiselle Pois Vert, Jane Hading, Judice ou Jeanne Granier.
<i>Étude de femme</i>, lithographie de Toulouse-Lautrec, 1893.

Parfois on repère un anonyme, une prostituée ou une spectatrice. Mais en général les sujets, tels Réjane et Galipaux dans Madame Sans-Gêne, étaient des personnages connus. Toulouse-Lautrec stylise par exemple en cinq couleurs la fameuse danseuse moderne Loie Fuller.
 «Cette lithographie est connue commente Anne Roquebert ancienne conservatrice en chef au Musée d'Orsay, chargée de cours à l'École du Louvre et spécialiste de Toulouse-Lautrec. Une majorité de ces feuilles tourne autour de la musique et particulièrement autour du bassoniste Désiré Dihau. 
C'était un ami de Toulouse-Lautrec mais aussi d'Edgar Degas. Pour lui, l'Albigeois du Moulin-Rouge a réalisé pas mal de travaux, dont des illustrations de chansons que Dihau avait mises en musique. De tels travaux sont conservés à la Bibliothèque nationale de France. Au total, on doit à Toulouse-Lautrec environ trois cents thèmes pour estampe.»

Ces feuilles retrouvées à Munich, dont il faudra savoir s'il s'agit de premiers tirages pour collectionneurs ou d'autres ultérieurs réalisés à l'attention des simples amateurs, renvoient au gai Paris. Ainsi la Tige au Moulin Rouge ou la Goulue en réinterprétation de la célèbre affiche. Beaucoup se réfèrent à des spectacles vus par Toulouse-Lautrec comme la couverture du programme de la pièce L'Argent. Scènes de répétitions au Théâtre Libre, aux Folies Bergère ou à l'Opéra (Madame Caron dans Faust) alternent enfin avec des études de femmes ou des scènes de procès au palais de justice. Le tout a le fumet du Montmartre festif et canaille de la fin du XIXe siècle, déjà très prisé internationalement du temps de l'artiste.

«Les enquêteurs devraient regarder du côté du collectionneur et critique d'art Julius Meier-Graefe, conseille Anne Roquebert qui, sous la Direction des musées de France, a été membre de la Mission d'étude sur la spoliation des juifs de France. Meier-Graefe est mort en 1935.» 

Pendant ce temps à Munich, les cinq experts emmenés par l'historien d'art allemand Uwe Hartmann poursuivent l'identification de la collection. Ils en sont à 118 œuvres classées litigieuses publiées.

 Cela sur 1.280 placées sous séquestre. Parmi ce total, seules 590 seraient des biens contestables par les ayants droit de familles spoliées durant les années 1930 et 1940.


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