UNE NEBULEUSE, PRIORITAIREMENT ANTISEMITE...
samedi, 18 mai 2013
Revue de presse : Jean-Yves Camus, «L’ultradroite est une nébuleuse»
Le politologue expert de l'extrême droite décrypte la pluralité des mouvements radicaux en marge du FN.
Recueilli par Amandine CAILHOL
Libération cliquez ici
Jeudi soir, environ 400 militants anti-mariage pour tous s'étaient donné rendez-vous place de la Sorbonne (cliquez ici).
Parmi les manifestants, des mouvements qui se veulent pacifistes – les
Veilleurs, Camping pour tous, les Hommen ou encore les Salopards.
Mais
aussi, quelques éléments plus radicaux, venus se greffer ; l’appel au
rassemblement ayant notamment été relayé sur les réseaux sociaux par les
Jeunesses nationalistes.
Des groupuscules issus de l’extrême droite
sont en effet présents depuis quelques mois en marge de la contestation
du mariage homosexuel.
Dimanche
dernier, ces mouvements se sont rassemblés à Paris, à l’occasion du
défilé annuel de l’ultradroite pour commémorer Jeanne d’Arc, — qui donna
lieu à une confrontation avec les Femen (cliquez là).
Entre eux mais séparément : au fil de cette journée, cinq cortèges
s’étaient succédé – les Jeunesses nationalistes et l’Œuvre française
d’un côté, partis de la place de la Concorde, l’Action française et les
royalistes, en provenance d’Opéra, le Renouveau français, venant de
Madeleine, suivi d’un cortège présenté comme unitaire, regroupant Europe
identitaire, la Nouvelle droite populaire, les Jeunes nationalistes
révolutionnaires (JNR), Troisième Voie et divers petits mouvements, et
enfin, en début d’après-midi, les membres de Civitas qui s’étaient donné
rendez-vous sur la place Saint-Augustin.
Jean-Yves
Camus, politologue français, spécialiste de l’extrême droite, suit ces
mouvements depuis de nombreuses années. Des groupuscules aux
positionnements variés qui ont trouvé une certaine tribune lors des
Manifs pour tous et des actions du Printemps français. Regroupés sous
l’étiquette extrême droite ou ultradroite, leurs lignes idéologiques ne
sont pourtant pas toutes identiques. Jean-Yves Camus, en revenant sur
cette manifestation du 12 mai 2013, relativise l’unité de ces mouvements
qui restent éclatés.
Plusieurs
mouvements d'extrême droite se sont illustrés en participant à la
contestation du mariage pour tous, en marge des diverses manifestations.
Pourquoi cette mobilisation ?
Ces
différents groupes étaient tous opposés au projet de loi ouvrant le
mariage et l’adoption aux personnes de même sexe, mais pas pour les
mêmes raisons.
Pendant les principales manifestations, le Renouveau
français et l’Action française étaient plutôt présents sous la bannière
Printemps français. Ils fustigeaient la destruction du sacrement de
l’institution du mariage et de la famille.
De leur côté, l’Œuvre
française et les Jeunesses nationalistes étaient mobilisés pour lutter
contre la destruction de la base de la société, sans pour autant se
référer à la religion. Les JNR et Troisième voie, quant à eux, n’étaient
pas présents, ou seulement à titre individuel.
Dimanche
dernier, l’ultradroite, bien que découpée en différents cortèges, s’est
donné rendez-vous le même jour autour de Jeanne d’Arc. Qu’est-ce qui
unit ces différents mouvements ?
Ceux
qui ont défilé dimanche partagent un minimum commun : l’opposition au
système et aux partis qui le font vivre. Ils se placent en opposition
contre l’ensemble de l’échiquier politique, jusqu’au Front national. A
ce sujet, une première divergence existe, mais la grande majorité de ces
groupes est désormais très critique à l’égard de ce qu’est devenu le
parti depuis l’arrivée de Marine Le Pen, notamment sur la question de la
composition ethnique de la France et, plus largement, sur le style
employé. Certains l’accusent d’avoir fait trop de concessions au
système. La démarcation est de plus en plus visible entre l’ultradroite
et le FN.
Dans quelles mesures s’éloignent-ils les uns des autres ?
L’ultradroite
est une nébuleuse composée de diverses sensibilités. Les divisions
portent notamment sur la nature du régime défendu : sur ce point, le
clivage est net entre les royalistes de Civitas et de l’Action française
et ceux qui promeuvent un régime certes autoritaire, mais non
monarchiste. Autre division : le poids de la religion. Le Renouveau
français est clairement dans une tradition catholique.
A l’inverse, pour
d’autres mouvements, le combat est d’abord celui du nationalisme ; la
question de la doctrine religieuse n’étant pas ou peu présente. Dans
cette mouvance, Troisième Voie et les JNR se présentent comme des
nationalistes révolutionnaires : ils sont contre la mondialisation, le
libéralisme, la financiarisation, la dérégulation, l’argent (ndlr: En un mot: les JUIFS.).
Les
références qu’utilisent certains sont parfois empruntées à la gauche.
Dimanche dernier, le franco-libanais Serge Ayoub, de Troisième Voie, se félicitait même du
programme du Front populaire...
Serge
Ayoub fait surtout référence à la notion d’Etat social. C’est un appel à
un socialisme populaire, au solidarisme, qui ne doit pas être confondu
non plus avec le national socialisme. Citer le Front populaire reste
cohérent, même s’il y a un certain anachronisme si l’on se souvient du
comportement de l’ultradroite de l’époque à son égard. Il y a recherche
d’une synthèse, à la manière de Jacques Doriot, fondateur du Parti
populaire français dans les années 1930. En fait, ces partis ne pensent
pas tant en termes de division gauche versus droite, mais plutôt centre
contre périphérie. Le centre, ce sont les partis qui gravitent dans le
système, les libéraux de gauche comme de droite. La périphérie, ce sont
eux, les opposants au système politico-économique libéral.
Pour autant, aucun amalgame n’est possible entre l’extrême droite et l’extrême gauche. La grande distinction repose sur la définition du peuple français. L’ultradroite se différencie par son antimulticulturalisme. S’il peut y avoir des convergences sémantiques entre les deux sur le discours d’opposition au système, elles restent superficielles.
Pour autant, aucun amalgame n’est possible entre l’extrême droite et l’extrême gauche. La grande distinction repose sur la définition du peuple français. L’ultradroite se différencie par son antimulticulturalisme. S’il peut y avoir des convergences sémantiques entre les deux sur le discours d’opposition au système, elles restent superficielles.
Richard Roudier du Réseau identité et de la Ligue du midi, disait, lui, devant la statue de Jeanne d’Arc : «Je préfère défiler sur la place rouge avec Poutine que manger un hamburger halal avec Obama devant la Maison Blanche.»
Il s’agit d’une phrase empruntée à Alain de Benoist [figure emblématique du mouvement de la «Nouvelle Droite», ndlr],
légèrement détournée. Elle souligne l’opposition de Richard Roudier à
tout ce qui symbolise l’Amérique, de l’économie de marché à la politique
de melting pot. La phrase originale a été formulée dans les
années 1980 : bien sûr, Roudier est profondément anticommuniste, et
s’éloigne ici de l’URSS. Pour autant, la Russie de Vladimir Poutine,
pays vu comme européen, son aspect autoritaire et dirigiste lui font
écho. (ndlr: Roudier cherche avant tout un créneau...JPPS)
Peut-on parler d’un certain éloignement entre ces divers groupes ?
Lors
des cérémonies pour Jeanne d’Arc, les groupes défilent, depuis
longtemps, le même jour, conjointement, mais tout en essayant de ne pas
trop se coller les uns les autres. Cette année, il y avait une tendance à
l’éparpillement, à l’effritement. L’enjeu, c’est aussi la visibilité :
il s’agit de montrer quel cortège sera le plus dense, quel groupe
poussera la contestation le plus loin. Une certaine concurrence demeure.
Et puis, ces mouvements ont une tendance intrinsèque à la
groupusculisation. Ils représentent au maximum 3 000 personnes à
l’échelle nationale, avec quelques entités un peu plus visibles et
plusieurs micro groupuscules de quelques personnes seulement.
Quelle est l’ambition de ces mouvements et de leurs leaders ?
Certains
participent au système électoral, c’est le cas de la Nouvelle droite
populaire qui a présenté des candidats aux dernières élections
régionales et législatives. La ligue du Midi, ainsi que Troisième Voie
sont également dans cette logique, et Civitas a annoncé son souhait de
participer aux élections municipales de 2014. Mais cela demande des
moyens qu’ils n’ont pas. En dessous d’un seuil de voix, ils ne peuvent
pas se faire rembourser les frais de campagne, ce qui rend compliqué cet
objectif électoral. En général, les élections sont plus une tribune
pour se faire connaître. Ils ne sont pas en mesure d’aller jusqu’au bout
et sont conscients qu’ils ont plus de chance de progresser par la
contestation, en dehors de l’expression du système électoral. Leur
objectif est surtout de faire vivre leurs idées.
Ce sont des militants
pour qui le pouvoir importe peu.
Ils veulent surtout maintenir une
tradition.
Porter la flamme.(ndlr: A mon avis, ils veulent surtout exprimer leur haine.JPPS)
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