CES BRAVES MUZZ (LE PASTEUR BEHNAM IRANI)
Behnam Irani, condamné il y a cinq ans : une lente peine capitale sans sentence
La
situation du pasteur Behnam Irani, un ancien musulman, est toujours
critique, cinq ans après sa condamnation à autant d’années de prison
pour « activités contre la sécurité nationale ».
La sanction est devenue effective depuis le 31 mai 2011 quand
ce chrétien a été incarcéré à la prison de Ghezal Hesar.
Battu par ses
co-détenus et ses gardiens, le pasteur se voit refuser toute assistance
médicale alors que son état de santé est précaire. Le risque de décès
est réel.
Behnam Irani avait été arrêté le 14
avril 2010 et condamné à un an de prison en janvier 2011, avec une
libération prévue pour le 20 octobre de la même année, puisqu’il avait
déjà passé plusieurs mois en détention en attendant son procès. Trois jours avant sa sortie, les autorités ont prolongé la durée de sa réclusion,
utilisant à cette fin les cinq années de prison avec sursis auxquelles
il avait été condamné le 23 février 2008 pour « activités contre la
sécurité nationale ». Ce procès avait eu lieu suite à l’arrestation du
pasteur, en 2006, pendant un service religieux pour ses activités
cultuelles.
Depuis, la situation de Behnam Irani s’aggrave du fait des
mauvais traitements dont l’absence de soins pour son ulcère à l’estomac
et ses problèmes de côlon qui lui occasionnent des saignements.
Le
détenu n’a pas accès au dispensaire de la prison, car les Renseignements
Généraux ont demandé aux médecins de ne pas réagir à sa
situation.
Behnam Irani est à peine capable de marcher et reste alité.
La politique dissimulée de lynchage de la justice iranienne
La peine de mort pour
apostasie, abandon de l’islam en l’occurrence, en Iran, a été médiatisée
suite à la condamnation à la pendaison du pasteur Youcef Nadarkhani.
Les protestations de divers gouvernements d’Etats occidentaux ont sauvé la vie du pasteur,
sans que le risque qu’il se fasse assassiner comme le pasteur Dibaj,
également libéré grâce à une campagne internationale, ne soit effacé.
Si l’apostasie est
interdite, le prosélytisme religieux non musulman est également un motif
de condamnation, officiellement pour des motifs d’ordre public ou de
sécurité nationale.
C’est ainsi que le pasteur Nadarkhani avait été accusé d’extorsion, de viol et d’intelligence avec Israël.
Le pasteur Farshid Fathi a lui été condamné
en mai 2012 à six ans de prison pour « atteinte à la sécurité
nationale, intelligence avec l’ennemi et propagande religieuse » après
avoir été arrêté pour avoir distribué des exemplaires de la Bible.
Mais
outre les condamnations sous de faux prétextes, l’application des
peines peut se distinguer des jugements rendus.
Durant leur détention,
ces chrétiens subissent diverses exactions, risquant parfois la mort
même quand aucune sentence capitale n’a été prononcée.
Le 30 octobre
2012, Sattar Beheshti, un blogueur chrétien est décédé à cause des tortures qui lui avaient été infligées en prison.
Condamné à huit ans de prison fin janvier 2013, le pasteur Saïd Abedini affirme, dans une lettre, subir d’horribles pressions, parfois insupportables, dont la finalité est de lui prouver que sa foi est vide et sans réalité.
Si l’opportunité du
châtiment capital est du ressort des Etats, encore faut-il, pour qu’elle
se justifie, que les condamnations soient proportionnelles aux actes
sanctionnés et que la justice soit exempte d’une hypocrisie consistant à
infliger des condamnations à l’issue potentiellement capitale qui ne
disent pas leur nom.
Le poète persan médiéval
Khosrovi avait écrit ces quelques vers aussi susceptibles de définir
la peine capitale non officielle au nom de la religion :
« Combien d’êtres blessés par les coups du destin !
On ne voit pas le trait, mais ils sont terrassés.
Combien de prisonniers de caprices du sort !
Leurs liens restent cachés, mais ils y sont rivés.
Combien d’assassinats le Ciel a commis !
Le sang ne coule pas, mais les morts sont nombreux. » (1)
Téhéran n’a pas paraphé la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants et n’en connaît non seulement pas la lettre mais non plus pas l’esprit. De la même manière qu’il ignore souverainement le Pacte international relatif aux droits civils et politiques de 1966 qu’il a ratifié en 1975, dont l’article 10 dispose que
« Toute personne privée de sa liberté est traitée avec humanité et avec
le respect de la dignité inhérente à la personne humaine. »
On ne voit
aucun trait de plume officiel de la justice dans le vécu pénal du
pasteur Irani, il risque toutefois bien d’être terrassé par la volonté
d’une justice allant sournoisement au-delà de sa propre sentence en le
plaçant dans une situation de lynchage à petit feu.
(1) Z. Safa, Anthologie de la poésie persane (Xe-XXe siècle), Connaissance de l’Orient, Gallimard/Unesco, 1964, p. 58.
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