A Dol, le souvenir d’une « forteresse de prière »
Dol-de-Bretagne, qui fut cité épiscopale, préserve sa cathédrale gothique « comme un joyau », non loin du Mont-Saint-Michel et au cœur du Pays de la Baie
Longue d’un peu moins de 40 mètres, la nef offre au visiteur un bain de lumière qui tranche avec l’aspect extérieur assez austère de la cathédrale.
Ne dites surtout pas aux Dolois qu’ils vivent dans une simple bourgade, et ne leur rappelez pas trop souvent que leur cité n’est qu’un chef-lieu de canton d’Ille-et-Vilaine. Dol-de-Bretagne est une « vraie ville », entendez-vous ! Petite ville, sans doute, mais de nouveau en croissance démographique, car l’immobilier y est bien moins cher qu’à Rennes ou Saint-Malo ; et d’ailleurs elle a dépassé, haut la main, les 5 000 habitants…
De fait, quand on se promène sur l’axe de la grande-rue des Stuarts, avec ses maisons anciennes et son offre commerciale, on sent d’emblée qu’on n’a pas posé les pieds ici dans l’un de ces gros bourgs armoricains où règnent en maîtres les tracteurs.
Dol, capitale naturelle
Car Dol est une « cité épiscopale » et cela constitue sa fierté. Elle fut même métropole ecclésiastique durant trois siècles et demi, de l’époque du roi breton Nominoë jusqu’à celle de Philippe Auguste, quand ses archevêques successifs avaient les autres évêques de Bretagne (à l’exception de ceux de Rennes et Nantes) pour suffragants. Les armoiries de la cité en témoignent : « D’or à trois losanges d’azur, chargés chacun d’une billette d’argent, surchargés d’une moucheture d’hermines »…
Une cathédrale trop méconnue du début du gothique, construite avec une forte influence normande, le confirme sur les hauteurs que la Manche venait battre encore vers le Xe siècle. La mer s’est retirée bien loin, derrière des kilomètres de digues, dans la vaste baie du Mont-Saint-Michel, en laissant aux pieds de la petite cité historique un marais dit « de Dol », débarrassé désormais des fièvres mauvaises et propice à la production des légumes.
La conséquence en est que la ville reste la capitale naturelle d’un « pays » qui porte son nom, et qui voit sa zone de chalandise s’étendre de la mer jusqu’aux portes de Combourg (pays de Chateaubriand), et du Couesnon jusqu’à la Rance.
Les « Souvenirs » de l’abbé Duine
L’abbé François Duine (1870-1924) est un Dolois qui a laissé de riches Souvenirs et observations sur la crise moderniste dans l’archevêché de « Rennes, Dol et Saint-Malo », ainsi que sur la vie des presbytères et les mœurs ecclésiastiques au début du siècle passé (1). Il a pu écrire au sujet de la cité qui lui était si chère : « Elle fut illustre au temps où l’importance d’un lieu se mesurait moins au nombre de ses habitants qu’à la fermeté du donjon et à la gloire de l’église. »
« Le clergé de Dol, poursuit-il, entêté de ses légendes saintes et de sa proéminence métropolitaine, a donné pendant des siècles un des plus notables exemples d’opiniâtreté que présente l’histoire… » De fait, ce clergé-là ne voulut jamais oublier que la Bonne Nouvelle chrétienne lui était parvenue, vers le VIe siècle, par le truchement des moines celtes fuyant les îles Britanniques, et non pas par l’évangélisation gallo-romaine arrivée jusqu’à Rennes ou à Nantes.
C’est d’ailleurs pourquoi, au même titre que Vannes, Quimper, Saint-Pol-de-Léon, Tréguier, Saint-Brieuc ou Saint-Malo, la ville reçoit désormais tous les sept ans, sous les bannières et les hermines, les pèlerins du Tro-Breizh lancés sur les pas des sept « saints fondateurs » de Bretagne.
« La cathédrale, c’est notre joyau »
« La cathédrale, c’est notre joyau », confirme la première adjointe à l’hôtel de ville, Jacqueline Fontmorin, en l’absence du maire (sans étiquette) Denis Rapinel. De fait, sans le prestige attaché à cet édifice de granit, bien des Français seraient en peine de placer la ville sur la carte, à ne pas confondre avec Dole (en Jura). Fort sentiment d’appartenance, donc, autour de cette construction du XIIIe siècle.
Appartenance qui se manifestait aussi, jusque dans les années 1930, par le port d’une coiffe bretonne bien spécifique pour les femmes doloises, avec deux larges « ailes » descendant en boucles de dentelle jusque sur les épaules. Un peu plus tôt, François-René de Chateaubriand, qui a laissé son nom à une place du centre, avait hanté le prestigieux collège local (1777-1781), où il avait effectué sa première communion.
Il a révélé quelques anecdotes à ce sujet dans ses Mémoires d’outre-tombe : « Notre enfance, y écrit l’Enchanteur, laisse quelque chose d’elle aux lieux qu’elle embellit, comme une fleur communique son parfum. »
à Dol-de-Bretagne, (Ille-et-Vilaine)
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